PORTFOLIO: What's left, France: Ce qu'il en reste

Mireille Mons, 49 ans, aide-soignante à l’Ehpad de TrèbesLe soir, quand on est arrivé, on a fait les transmissions. Mes collègues, avantde partir, ont dit : « Que le toit ne vous tombe pas sur la tête ! » Le vent continuait à souffler. Je n’ai pas de notion du temps. Il y avait plein d’eau. Une dameétait par terre en plein milieu du couloir, on l’a relevée, changée... et puis tout s’est enchaîné.On est resté très calme, même les résidents. On les a montés au premier étage.Il en restait cinq que l’on n’a pas pu monter, alors on les a suspendus avecdes filets pendant au moins deux ou trois heures. Une dame criait parce qu’elle avait mal. Pendant longtemps, chaque soir en allant me coucher, je l’entendais. L’ascenseur fonctionnait au départ, mais en cas d’inondation, on n’a pas le droit de l’utiliser. Puis il n’a plus fonctionné. On a essayé de monter un monsieur,mais on n’arrivait pas à le soulever.Les trappes de désenfumage se sont ouvertes, il pleuvait à l’intérieur.Là, je me suis sentie désespérée. Je ne sais pas si les résidents réalisaient.Ma collègue était très calme. On a trouvé un équilibre pour faire face.Avec le jour, on a vu la route près de l’Ehpad, elle était ouverte comme s’il y avait eu une bombe.Quand les pompiers sont venus nous aider à détacher les malades, ils nous ont dit : « On est venu taper deux fois dans la nuit, mais vous n’avez pas répondu. »Et ils nous ont laissés. Est-ce que c’était vrai, ou pas... je ne comprends pasque les pompiers nous aient laissés comme ça. J’y repense encore, et ne pas avoir de réponse... Ils ont évacué les résidents, les ont dispersés.Je me suis posé la question de savoir si je devais partir. Mais pour aller où ?Il fallait que je me confronte peut-être à la structure avant d’envisager de partir, et finalement j’y suis restée.Lors de l’inondation, on était dans l’action, tout était noir. C’est après que çaa été dur.
Ce qu'il en reste

Mireille Mons, 49 ans, aide-soignante à l’Ehpad de Trèbes

Le soir, quand on est arrivé, on a fait les transmissions. Mes collègues, avant

de partir, ont dit : « Que le toit ne vous tombe pas sur la tête ! » Le vent continuait à souffler. Je n’ai pas de notion du temps. Il y avait plein d’eau. Une dame

était par terre en plein milieu du couloir, on l’a relevée, changée... et puis tout s’est enchaîné.

On est resté très calme, même les résidents. On les a montés au premier étage.

Il en restait cinq que l’on n’a pas pu monter, alors on les a suspendus avec

des filets pendant au moins deux ou trois heures. Une dame criait parce qu’elle avait mal. Pendant longtemps, chaque soir en allant me coucher, je l’entendais. L’ascenseur fonctionnait au départ, mais en cas d’inondation, on n’a pas le droit de l’utiliser. Puis il n’a plus fonctionné. On a essayé de monter un monsieur,

mais on n’arrivait pas à le soulever.

Les trappes de désenfumage se sont ouvertes, il pleuvait à l’intérieur.

Là, je me suis sentie désespérée. Je ne sais pas si les résidents réalisaient.

Ma collègue était très calme. On a trouvé un équilibre pour faire face.

Avec le jour, on a vu la route près de l’Ehpad, elle était ouverte comme s’il y avait eu une bombe.

Quand les pompiers sont venus nous aider à détacher les malades, ils nous ont dit : « On est venu taper deux fois dans la nuit, mais vous n’avez pas répondu. »

Et ils nous ont laissés. Est-ce que c’était vrai, ou pas... je ne comprends pas

que les pompiers nous aient laissés comme ça. J’y repense encore, et ne pas avoir de réponse... Ils ont évacué les résidents, les ont dispersés.

Je me suis posé la question de savoir si je devais partir. Mais pour aller où ?

Il fallait que je me confronte peut-être à la structure avant d’envisager de partir, et finalement j’y suis restée.

Lors de l’inondation, on était dans l’action, tout était noir. C’est après que ça

a été dur.